Depuis plusieurs années, de nombreux procédés novateurs ont été créés afin d’utiliser des ressources naturelles comme source d’énergie.
Dans ce domaine, certaines énergies sont utilisées afin d’alimenter les réseaux de chauffage urbain à travers des techniques telles que la géothermie ou la biomasse. L’objectif commun de ces techniques est de s’affranchir de l’usage de sources d’énergies épuisables dont le prix est en hausse constante telles que le gaz ou le fioul.
Une nouvelle étape technologique est en train d’être franchie en récupérant l’énergie issue des datacenters.
Les datacenters des gouffres énergétiques
Pour leur fonctionnement, les datas center nécessitent une quantité d’énergie absolument gigantesque (allant jusqu’à 2,5 kilowatts/m²) et cette nécessité ne fait que s’accroitre.
A titre de représentation, un datacenter de 10.000 m² consommerait autant d’électricité qu’une ville de 50 000 habitants. Cette consommation colossale est liée à un très fort gaspillage d’énergie.
En effet, pour son fonctionnement, un datacenter « classique » utilise la moitié de l’énergie pour les équipements informatiques et télécommunication. Ces équipements dégageant une très forte chaleur il est nécessaire de les refroidir pour garantir leur fonctionnement.
C’est de là que provient la deuxième moitié de la consommation d’énergie : du système nécessaire au refroidissement (groupes froids, climatisations…).
Cette consommation électrique représente un coût financier important, qui ne fera que s’accentuer avec la taxe carbone, mais a aussi un impact considérable sur l’environnement.
Principe de récupération de l’énergie des datacenters
Comme évoqué, les datacenters sont de gros producteurs de chaleur. Il faut donc les refroidir en utilisant en particulier des équipements appelés groupes froids.
Habituellement perdue, la chaleur dégagée par les groupes froids et évacuée sous forme d’un air chaud peut être récupérée par des échangeurs thermiques. Ainsi, en sortie d’échangeurs, une eau à 55 °C cheminera dans les canalisations du réseau du parc d’activités et assurera la production de chauffage et d’eau chaude.
Quelques exemples d’usage déjà établis
- Academica à Helsinki
En Finlande, la cathédrale Uspenski (un célèbre monument d’Helsinki) accueillera à partir du mois d’avril le data center de l’opérateur de télécommunications Academica. Le lieu sera ainsi transformé en immense chaufferie.
Un abri creusé pendant la dernière guerre a été réaménagé pour accueillir le data center. La chaleur dégagée par celui ci va être récupérée et revendue pour alimenter le circuit d’eau chaude de la ville. « Cela permettra de chauffer 1.000 appartements de 90 m² », affirme Pietari Päivänen, directeur commercial et marketing d’Academica.
- Le projet Val d’Europe de Dalkia
En France, le premier système de ce type a été mis en place.
Le site de Val d’Europe regroupe plus de 1700 entreprises implantées dans son parc d’activité, qui jouxte Disneyland Paris. Le parc d’activité abrite un immense data center dans un bâtiment d’une superficie de 8000 m².
De la même façon que décrit précédemment, la chaleur dégagée par le système de refroidissement de celui-ci est utilisée comme mode de chauffage pour les entreprises adjacentes et en particulier pour Eurodisney.
A terme, il devrait permettre de chauffer 600 000 m² de bureaux et d’éviter l’émission de 5400 tonnes de CO2 par an, mais aussi de fournir de l’eau chaude aux édifices, et peut-être même à la piscine communale. Pour l’instant, un seul échangeur thermique d’une puissance de 2,4 MWt a été installé.
A horizon trois ans, la croissance du parc est prévue pour atteindre 25000 m². Dalkia souhaite mettre en place plusieurs échangeurs pour une puissance totale de 7,8 MWt. A terme, ce réseau de chaleur fournira 26.000 MWh. Par ailleurs, une chaufferie gaz de 5 MW a été prévue pour assurer l’alimentation du réseau en secours.
L’ investissement pour ce projet est estimé à 4 millions d’euros
L’établissement bancaire, propriétaire du data center et du bâtiment, a pris en charge 10 % de l’investissement, le reste étant à la charge du gestionnaire du réseau, Dalkia. En outre, la filiale de Veolia Environnement et d’EDF a entrepris des démarches pour obtenir une subvention du Fonds chaleur de l’Ademe, mais attend toujours la réponse de l’organisme.
Pour amortir ces investissements et réduire les frais de maintenance, la société bancaire a signé un contrat de 25 ans avec Dalkia qui rachète à bas prix la chaleur récupérée issue des groupes froids.
Les abonnés, quant-à eux, bénéficient d’une tarification selon la puissance souscrite d’environ 8 centimes d’euros par kWh. « Ce tarif est moins cher que l’individuel électrique et légèrement supérieur au chauffage au fioul. Mais, le prix de cette énergie renouvelable restera très stable alors que celui des énergies fossiles risque d’encore progresser ces prochaines décennies », souligne Jean-Philippe Buisson.
- Le projet Microsoft research : serveur dans des habitations individuelles
De son côté, Microsoft a pour idée d’implanter ce système au sein même des foyers. En effet le géant de l’informatique souhaite utiliser la chaleur produite dans des petits datacenters pour réchauffer des habitations.
Microsoft Research propose d’utiliser les connexions ADSL pour distribuer de petits datacenters dans les foyers à réchauffer. Le propriétaire d’une habitation pourrait ainsi acheter un mini data center constitué de 40 à 400 CPU qu’il ferait installer en lieu et place d’un autre type de chauffage plus classique (chaudière à gaz, pompe aérothermique…).
Microsoft va plus loin puisque d’anciens serveurs disposant de TDP trop élevés seraient recyclés. Dans un usage en source de chaleur, ceux-ci prendraient toute leur valeur. Plusieurs modèles seraient proposés suivant les régions afin d’adresser le problème des saisons et de la variation de consommation calorique qui en découle.
Au-delà de l’intérêt électrique, les chercheurs estiment qu’il y a également une opportunité financière à saisir. 40 serveurs informatiques coûtent approximativement 16.000 dollars par an, incluant le coût de la construction des centres et leur refroidissement. Si ces serveurs étaient concentrés dans des habitations individuelles, le coût est évalué à 3.600 dollars par an. «L’entreprise pourra ainsi payer les frais d’électricité domestique et cela lui serait toujours financièrement avantageux», résume Randall Stross pour le New York Times.
L’été, si les résidents ne souhaitent pas avoir du chauffage, il est possible de réorienter l’air chaud vers l’extérieur, tant que la température extérieure n’excède pas les 95 degrés Fahrenheit (35°C).
Reste qu’il faudrait peu de maintenance pour que l’idée reste pertinente. Trois visites annuelles sont évoquées pour qu’un serveur donné reste rentable. Enfin, un doute important apparait en terme de sécurité des données. Comment les compagnies high-tech peuvent s’assurer que les données confidentielles de leurs clients sont en sécurité au sous-sol de la maison de personnes inconnues? Que faire en cas d’inondations, pannes de courant?.
Avec l’explosion du nombre de data centers, la récupération de la chaleur produite par ces derniers comme source d’énergie est promis a un bel avenir.
La demande mondiale pour les « data centers » explose : Tier1 Research, un cabinet d’études et de conseils américain spécialisé dans les « data centers », estime que les besoins (exprimés en nombre d’armoires – les fameux « châssis », encore appelés « baies » ou « racks » -qui accueillent les serveurs dans les « data centers ») n’ont progressé que de 12% en 2010, de 14% en 2011, avant de s’accélérer en 2012 (+16 %).
Malgré un cout de construction de près de 10.000 euros en moyenne , la pérennité et rentabilité de ces systèmes sera de toute évidence avérée.
Je suis pour le datacenter comme mode de chauffage 🙂 Malheureusement l’hébergement des datacenters chez les particuliers semble pour l’instant irréalisable pour des questions de sécurité des données et de mutualisation de la maintenance…Dommage, enfin pour l’instant !
Tout à fait Julien. C’est en effet tous les enjeux sur lesquels des acteurs comme Microsoft travaillent à l’heure actuelle.