Le 28 février dernier, dans la très renommée revue britannique Nature, une équipe de physiciens de l’Institut Lumière Matière, en collaboration avec l’Institut Néel, a annoncé avoir mis au jour une nouvelle technique de récupération de l’énergie osmotique présentant une efficacité plus de 1000 fois supérieure à celle atteinte par les procédés actuels. Cette découverte scientifique majeure est l’occasion pour Energystream de revenir sur cette énergie marine renouvelable (EMR) encore peu connue mais dont le potentiel s’avère énorme.
L’énergie osmo-quoi ?
D’après Futura-Science, l’osmose désigne le passage de molécules de solvant, en général de l’eau, à travers une membrane semi-perméable, depuis le milieu le moins concentré (hypotonique) en solutés vers celui le plus concentré (hypertonique). Par exemple, mettez en présence de l’eau douce et de l’eau de mer que vous séparez par une membrane. Vous observez alors que l’eau douce est attirée dans la chambre contenant l’eau de mer, la membrane laissant passer exclusivement cette première pour retenir la seconde. Conséquence : la différence de hauteur d’eau entre ces deux milieux crée une pression dite hydrostatique, pression pouvant être utilisée pour actionner une turbine, entre autres.
La centrale osmotique pilote de Tofte
Si le phénomène osmotique est connu de longue date, il aura toutefois fallu attendre 2009 pour que soit mis en service le premier prototype de centrale osmotique au monde, à Tofte, à l’embouchure du Fjord d’Oslo. Cette centrale d’une puissance de 4 kW, contruite par Statkraft, est destinée à tester la fiabilité de cette technologie et à en optimiser le rendement. D’après le site institutionnel de l’entreprise norvégienne « le défi principal consiste à mettre au point une membrane capable d’attirer suffisamment d’eau pour que la pression qui en résulte actionne la turbine de manière exploitable. Lorsque la performance attendue sera atteinte, la technique osmotique pourra devenir une source d’énergie renouvelable compétitive.” Selon les estimations des ingénieurs Statkraft, ce potentiel de production à l’échelle planétaire serait de 1600 à 1700 TWh par an, soit environ 50 % de la production électrique annuelle de l’Union européenne.
La découverte majeure de l’Institut Lumière Matière
L’énergie osmotique est aujourd’hui la moins développée des EMR en raison notamment de l’importance des investissements qu’elle requiert et de la faible performance des membranes actuellement conçues (de l’ordre de 3 Watts par mètre carré). Cependant, la récente découverte des physiciens de l’Institut Lumière Matière et de l’Institut Néel pourrait changer la donne.
Le dispositif qu’ils ont imaginé, composé d’une membrane imperméable et isolante électriquement, a été traversé en un trou unique par un nanotube de Bore-Azote. En séparant un réservoir d’eau salée et un réservoir d’eau douce avec cette membrane, les physiciens sont parvenus à générer un courant électrique d’une intensité considérable (plus de détails sur l’expérience ici).
Si l’on extrapole les résultats obtenus, une membrane “nouvelle génération” de 1 mètre carré aurait une capacité d’environ 4 kW, soit plus de 1000 fois la performance des membranes actuelles. L’énergie osmotique pourrait alors entrer dans une nouvelle ère.
Un dixième des besoins globaux en électricité, c’est ce que pourrait théoriquement couvrir l’énergie osmotique selon Statkraft. Jusqu’ici freinée par les performances de ses membranes, cette énergie semble désormais promise à un bel avenir. Un avenir qui s’écrira peut-être sur la façade littorale française…
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