Concept d’abord flou et débattu, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) est devenue une réalité en France depuis quelques années, galvanisée par les initiatives européennes d’une part et soutenue par la législation sur le reporting d’autre part. Que se cache-t-il derrière les obligations de reporting RSE ? Et où en est-on aujourd’hui ?
La RSE est le croisement entre 3 variables fondamentales pour l’activité de l’entreprise, en anglais ‘people’, ‘planet’ and ‘profit’. Si les avis divergent d’une organisation et d’un pays à l’autre, l’Union Européenne en a tenté une définition en 2001 dans son livre blanc : « l’intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes ». Afin de concrétiser la volonté française d’avancer dans ce domaine, la France a émis dès 2010 un article de loi (article 225 de la loi « Grenelle 2 » ) visant à obliger les entreprises à publier des informations de RSE dans leur rapport de gestion et à les faire vérifier par un organisme tiers indépendant. Le décret d’application précisant les modalités de mise en œuvre a été publié en avril 2012, et le MEDEF a dans la foulée édité un guide méthodologique pour accompagner les entreprises dans l’application ces obligations.
1. Le reporting : pour qui ? Sur quoi ?
Toutes les entreprises ne sont pas concernées par ces obligations. Pour l’exercice 2013, le reporting s’impose bien sûr à toutes les entreprises cotées mais aussi à toute entreprise (même non cotée) de plus de 2000 salariés, et dont le chiffre d’affaire net dépasse 400 millions d’euros.
Les informations à publier concernent « la manière dont les entreprises prennent en compte les conséquences sociales et environnementales de leurs activités ainsi que sur leurs engagements sociétaux en faveur du développement durable ». Elles permettront aux investisseurs et aux parties prenantes d’appréhender de manières concrète la performance RSE de l’entreprise.
Ces informations couvrent 42 thématiques et sont structurées en trois catégories : les informations sociales, les informations environnementales et les informations relatives aux engagements sociétaux en faveur du développement durable.
Toutes ces informations extra-financières sont complexes à réunir. Les entreprises doivent s’atteler à mettre en place pour la première fois des protocoles de collecte, des référentiels formalisés, des mécanismes de preuve de conformité pour des notions parfois très abstraites… L’ampleur de la tâche peut faire peur ! La plupart d’entre elles comptent sur des logiciels de reporting spécialisés pour surmonter ces obstacles.
2. Focus sur les informations environnementales
Intéressons nous de plus près aux informations environnementales à divulguer. Voici les grands chapitres concernés :
- La politique générale en matière environnementale, c’est-à-dire l’organisation mise en place pour prendre en compte les questions environnementales, les actions de formation et de sensibilisation des salariés et les moyens consacrés à la prévention des risques environnementaux. Quand cela est possible, s’il n’y a pas de litige en cours, l’entreprise doit également renseigner le montant des provisions et garanties pour risques en matière d’environnement.
- La pollution et gestion de déchets englobe entre autres les mesures de prévention, de réduction ou de réparation de rejets dans l’air, l’eau et le sol affectant gravement l’environnement, et les mesures de gestion des déchets (prévention, recyclage…).
- L’entreprise doit également être transparente sur sa gestion des ressources : consommation d’eau, de matières premières et son utilisation des sols, ainsi que sur les mesures prises pour améliorer l’efficacité dans leur utilisation. Elle doit aussi afficher les mesures prise pour améliorer son efficacité énergétique et son recours aux énergies renouvelables.
- Concernant le changement climatique, les entreprises doivent renseigner leurs rejets de gaz à effet de serre et leur capacité d’adaptation aux conséquences du changement climatique
- Enfin, les entreprises doivent témoigner des mesures qu’elles ont appliqué pour préserver ou développer la biodiversité.
3. Une première année prometteuse
Deloitte a fait un bilan un an après la mise en application de la loi sur les entreprises du SBF120. La conclusion : une mobilisation forte, mais des hétérogénéités selon les informations demandées.
Une forte mobilisation car 101 entreprises, soit 92%, ont fait référence dans leur rapport annuel au nouveau dispositif, et consacré une partie dédiée pour y répondre.
En revanche, en matière environnementale, si les thématiques sont globalement bien couvertes, il reste des divergences logiques en fonction du type d’information. En effet, lorsqu’elles sont quantifiables et en lien avec l’activité (ex : énergie, gaz à effet de serre, déchets…), les informations sont précises et détaillées. Mais lorsqu’elles sont difficiles à quantifier ou non normées (biodiversité, nuisances sonores, utilisation des sols, adaptation au changement climatique…), les entreprises ont encore des difficultés à évaluer leur impact.
Preuve de la pro-activité de ces entreprises : les trois quarts d’entre elles ont demandé une vérification par un organisme tiers, bien que le dispositif n’est été entériné qu’en juin de cette année.
Le reporting RSE s’impose donc bel et bien comme une réalité opérationnelle et, dès le 31 décembre 2013, l’obligation de publication sera étendue à toutes les entreprises de plus de 500 salariés (et 100M€ de total de bilan ou de CA). Bien sûr, il s’agit là d’une contrainte supplémentaire pour les entreprises lors de l’émission de leurs résultats. Mais cette législation les incite surtout à intégrer la notion de durabilité dans tous leurs processus de décision. A partir de maintenant, elles devront se projeter à long terme que ce soit par rapport à l’optimisation des consommations en énergie (‘planet’), aux stratégies de recrutement (‘people’) mais toujours dans l’objectif de maximiser leur performance économique (‘profit’) de manière pérenne. Un mal pour un bien !
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