Pour respecter la promesse énergétique de la France (23% d’énergie « verte » d’ici 2020), il est nécessaire d’intégrer progressivement les ENR dans le réseau. Mais les centrales à énergies renouvelables fonctionnent bien souvent de manière intermittente: la production d’électricité fluctue fortement en fonction des paramètres temporels et climatiques ; ces variations s’avèrent difficiles à ajuster avec la demande en fourniture d’énergie.
La problématique de l’intermittence de la production
Le taux de charge global d’une éolienne se définit par le rapport entre le nombre d’heures de fonctionnement à puissance nominale et le nombre d’heures d’une année. Pour donner un exemple, celui des éoliennes terrestres est assez faible ; il se situe entre 23 et 24%. Afin de compenser cette forte intermittence de la production d’ENR, les fabricants prévoient donc souvent des centrales thermiques d’appoint près des parcs de production d’énergie renouvelable. S’il assure ainsi la continuité de la production, ce modèle de production entre en contradiction avec la promesse « verte » des ENR.
Un des défis pour favoriser l’implantation des ENR est donc de trouver des moyens de stockage de courte durée pour équilibrer et lisser leur production d’électricité. Même si on considère que l’électricité est une énergie difficilement stockable à grande échelle, il existe des solutions technologiques récentes: station de transfert d’énergie par pompage d’eau, stockage individuel sur les batteries des voitures électriques avec l’émergence des « smart grids », mais aussi moins connu : le Système Inertiel de Stockage d’Énergie.
Le Système Inertiel de Stockage d’Énergie (SISE), quèsaco ?
Le système de volant d’inertie a longtemps été utilisé pour la régulation des machines à vapeur. Le principe ancien du stockage sous forme d’énergie cinétique apparait aussi récemment sur des projets de récupération d’énergie de freinage dans les voitures par exemple.
Le principe du volant d’inertie se conçoit aisément : la mise en rotation mécanique d’une charge cylindrique permet de conserver en partie l’énergie transmise à la charge sous forme cinétique et de la récupérer dans un temps réduit.
Appliqué au stockage de l’énergie électrique, le volant d’inertie fonctionne de la façon suivante : une masse (anneau ou tube) en fibre de carbone est entraînée en rotation par un moteur électrique. L’apport en énergie électrique permet de faire tourner cette masse à des vitesses extrêmement élevées en quelques minutes : entre 8000 et 16000 tour/min. Une fois lancée, la masse continue à tourner, sans alimentation en courant.
L’électricité est ainsi stockée sous forme d’énergie cinétique ; et elle peut être ensuite réinjectée dans le réseau grâce à une génératrice. Pour minimiser les pertes par frottement de la charge autour de l’axe, des roulements magnétiques sans contact sont montés, le tout dans une enceinte confinée sous vide.
Grâce à ce système mécanique et électrique, l’énergie peut être stockée de 15 à 30 minutes avec un rendement moyen de 90%. La phase de stockage est contrairement à une batterie chimique, très courte et permet donc un temps de réponse assez faible.
La simplicité du système permet une grande fiabilité avec un besoin en maintenance quasi nul et une longue durée de vie (100 000 cycles de charge/décharge minimum, comparé à 1000 cycles en moyenne pour une batterie lithium-ion). Enfin, en comparaison avec les batteries chimiques, l’empreinte écologique de ce type de stockage est très faible, et le recyclage bien plus aisé.
Les applications du volant d’inertie
Le principe de volant d’inertie est déjà utilisé avec le rôle de stockage tampon entre les productions intermittentes (éolien, solaire) et le réseau électrique.
L’application la plus importante est située aux USA dans l’état de New York et concerne la centrale de régulation électrique à stockage inertiel de Stephentown. Réalisée par la société Beacon Power en 2011, elle peut répondre en quelques secondes afin de fournir environ 10% de l’ensemble des besoins de régulation de fréquence de la ville de New York. Avec une puissance de 20MW, cette centrale permet de prélever et de réinjecter en permanence de l’énergie dans le réseau grâce à 200 volants d’inertie.
Plus récemment, l’entreprise Temporal Power, innovatrice dans le domaine, a annoncé en mai 2013 avoir signé un accord avec Ontario Power Generation (principale compagnie de production et de commercialisation d’électricité de la province canadienne de l’Ontario). Il prévoit l’installation d’une centrale de régulation électrique à stockage inertiel à Tillsonburg au Canada, dans une région massivement équipée d’éoliennes. Temporal Power a développé une nouvelle génération de volants d’inertie avec un taux de restitution de l’électricité qui atteint 95%.
En France le ministre du redressement productif a lancé le 5 novembre un appel à idées pour des solutions innovantes dans le domaine du stockage de l’électricité. Le système inertiel de stockage d’énergie apparaît de plus en plus comme un nouvel outil de l’équilibre production/demande et un complément à la mise en place des ENR sur les réseaux.
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