Le 23 mars prochain, vous déciderez. Vous voterez pour les conseillers municipaux qui, selon vous, seront les plus compétents pour prendre les décisions structurantes de votre ville pour les 6 prochaines années. Pour aider les lecteurs parisiens d’Energystream dans leur réflexion, nous sommes entrés en contact avec les deux principales candidates à la Mairie de Paris, Mme Hidalgo et Mme Kosciusko-Morizet, afin de leur poser 5 questions sur le volet énergétique de leur programme électoral pour la ville Lumière. Dans un 1er entretien, vous avez eu l’occasion d’apprécier le « Paris énergétique » de NKM… Honneur aujourd’hui à l’équipe sortante d’A. Hidalgo et son programme « Paris qui ose ». Interview énergétique.
1) Vous faites de l’environnement, de l’innovation et des réseaux intelligents des priorités dans votre programme. Quelles mesures concrètes proposez-vous pour mener à bien cette promesse ?
« L’environnement et le développement durable sont les défis majeurs du 21e siècle, et cela notamment en matière de nature en ville, d’économie circulaire et de transition énergétique. Nous avons des objectifs concrets et nous proposons des solutions concrètes, qui s’appuient, en effet, sur l’innovation et les réseaux intelligents.
Des objectifs concrets :
- La nature : elle doit être présente dans Paris notamment au travers de l’agriculture urbaine qui a toute sa place dans notre métropole, non pas de façon anecdotique, mais pour nourrir réellement les Parisiens. Ce grand pas en avant nourrira, embellira et réinventera la Ville.
- L’économie circulaire : les villes consomment de grandes quantités de ressources qui se transforment en diverses formes de déchets. Passer de la société du jetable à la société du durable est un objectif qui permettra de produire sans piller, consommer sans gaspiller et recycler sans détruire. Cette nouvelle approche concernera l’alimentation et la consommation de biens via le recyclage mais aussi l’énergie consommée et perdue en dissipation, frottement, freinage…
- La transition énergétique : une rupture est nécessaire dans les modes de consommation et de production pour aller vers des comportements plus économes en énergie. La fin de l’énergie à bon marché et la prise de conscience des effets de l’utilisation massive des combustibles fossiles sur le climat imposent de consommer moins, plus intelligemment ; de recycler et récupérer plus ; et de produire de l’énergie différemment.
Des moyens proposés importants :
- Pour atteindre ces objectifs, 1 milliard d’euros a été budgété sur la mandature 2014-2020 pour la transformation de Paris en une métropole durable et intelligente. Nous aurons les moyens de faire de Paris la métropole à la pointe de l’urbanisme écologique, de l’économie circulaire et de la transition énergétique.
- Cet investissement permettra à Paris d’être le leader mondial d’une innovation sociale et technologique répondant efficacement et durablement aux défis de l’urbanisation du monde.
- Les réseaux intelligents nous permettront d’entrer dans une nouvelle ère d’efficacité de la ville et de mutualisation des capacités.
Des mesures et des solutions qui bénéficieront des expériences et des tests engagés depuis 2001 :
- 100 hectares de toitures et façades seront végétalisés et 20 000 arbres seront plantés ; potagers partagés, fermes mobiles et plantations de grande ampleur seront notre avenir ; l’agriculture urbaine sera sur les toits, dans les espaces en friche, dans les containers… Des exemples concrets sont à notre portée : les toits d’Agro ParisTech ou du nouveau centre commercial Beaugrenelle sont des exemples à suivre.
- Des entreprises privées et des entrepreneurs ont émergé et prennent le relais, comme UpCycle qui recycle le marc de café pour cultiver, dans Paris, des champignons, sources de protéines. Il s’agit d’investir dans la recherche et l’innovation et de soutenir ces entrepreneurs comme nous voulons le faire avec l’ « Arc de l’innovation » (de la porte de Versailles jusqu’à Clichy Batignolles, en passant par les portes de Vincennes et de Clignancourt) qui comprendra 100 000 m2 d’incubateurs d’entreprises, des laboratoires, des espaces de télétravail et de co-working, et des learning centers.
- L’innovation sociale sera aussi soutenue dans les domaines de la permaculture et l’agroécologie via les AMAP, qui permettent aux Parisiens de manger sainement des aliments produits près de chez eux ;
- La production globale de déchets sera diminuée de 7% d’ici 2017. Les acteurs privés seront associés à nos initiatives pour créer des circuits efficaces et intelligents de collecte, de restauration et de recyclage des objets du quotidien ; nous créerons au moins une ressourcerie par arrondissement ;
- Un pôle de recherche et développement sur la propreté et le traitement des déchets sera adossé à l’École de la Propreté de Paris et à l’École des Ingénieurs de la Ville de Paris. Il permettra aux jeunes entreprises innovantes et aux structures de l’économie sociale et solidaire de développer et d’expérimenter de nouveaux projets, de nouveaux dispositifs et de nouveaux engins ;
- De nouveaux éco-quartiers, zéro déchet, zéro carbone, seront créés afin que Paris héberge des territoires de pointe pour l’écologie comme nous l’avons fait avec Fréquel Fontarabie dans le 20e et Paris Nord Est dans le 19e. A terme, l’ambition est de nous préparer à une ville zéro déchet et zéro carbone ;
- Pour la transition énergétique, nous avons une vision multi-réseaux afin d’éviter à la fois les investissements inutiles et les gaspillages. Il s’agira de récupérer les énergies dissipées. Les échanges de chaleur pour récupérer, stocker et utiliser les énergies qui se dispersent dans la nature deviennent technologiquement possibles et économiquement rentables. Dans le 12e arrondissement, une école est chauffée grâce à la chaleur des eaux usées des habitations du quartier. Dans le 15e arrondissement, un immeuble à loyer modéré a été équipé de radiateurs-calculateurs qui dissipent l’énergie de processeurs de calcul sous forme de chaleur, permettant de chauffer gratuitement et écologiquement les appartements. Nous avons également expérimenté la récupération de chaleur d’un « data center ». C’est ce genre d’innovations que nous voulons généraliser sans préjuger des technologies gagnantes ;
- Les réseaux électriques et les compteurs « intelligents » rendent possible dès maintenant la relève des consommations et les interventions à distance ainsi que des dépannages plus rapides. De la même manière, les nouvelles technologies sont mûres pour améliorer à grande échelle la régulation des voiries et de la circulation automobile. L’automatisation des feux, la gestion des flux et les systèmes dynamiques seront modernisés ;
- Des sources nouvelles d’énergie seront développées pour tripler la part des énergies renouvelables d’ici dix ans. Il faudra améliorer la production de masse et augmenter la part d’énergie produite en Île-de-France – qui n’est que de 10% aujourd’hui. Cette part peut être à la fois augmentée et moins polluante (géothermie, solaire thermique, biomasse…). »
2) Selon l’Agence Européenne pour l’Environnement, la ville de Paris présente des niveaux de pollution de l’air inquiétants, bien au-dessus de la moyenne européenne. Que comptez-vous faire pour enrayer cette tendance ?
« En termes de bilan, la Ville de Paris s’est attaquée de façon volontariste et avec des résultats importants à la réduction de la pollution :
- Diminution de 35% de particules fines PM10 et de 40% des PM2,5 depuis 2002 (malgré la diésélisation accrue du parc auto en France), dont un tiers dû à la politique d’aménagement municipale ;
- Moins 30% d’émissions d’oxydes d’azote depuis 2002, moins 13% d’émissions de CO2 dont les 3/4 sont dus à la politique d’aménagement municipale ;
- Réduction de 94% du dioxyde de soufre (SO2), de 90% du benzène et 98% du plomb ;
- 2 fois moins de Parisiens qu’en 2002 soumis à des teneurs en oxydes d’azote supérieures aux seuils de nocivité ;
- Réduction de 78% des Parisiens exposés à des niveaux de particules supérieurs à l’objectif de qualité depuis 2002.
Notre objectif est de continuer notre politique volontariste en matière écologique:
- D’ici 2020, nous souhaitons développer à plus grande échelle les transports non polluants ;
- Nous voulons diminuer de 40% supplémentaires les oxydes d’azote, de 28% les particules fines et de 40% les particules très fines.
Des mesures ambitieuses seront prises pour faire de Paris un exemple :
- Une politique de transports tournée vers la réduction de la pollution, avec de grandes innovations. Nous avons déjà su miser sur la diversité : tramway, bus, véhicules en libre-service, transports en commun de qualité. La mutation vers la mobilité électrique et la suppression du diesel, la politique en faveur du vélo, la diminution de la vitesse rendront possibles de nouvelles avancées.
- Il faudra faire de Paris le leader de la mobilité électrique. Une partie des Vélib’ deviendra électrique, permettant l’extension de son périmètre, un service de scooters électriques en libre-service sera mis en place, Autolib’ s’étendra à toute la métropole, et le parc automobile municipal sera électrique ou hybride. Un site de recharge sera installé tous les 500 mètres ainsi que des bornes de recharge rapide pour les bus, les taxis, les autocars et les poids lourds ;
- Un plan sera engagé avec la RATP pour remplacer les bus diesels par des véhicules hybrides ou électriques. Dès le début de mon mandat, 300 bus hybrides seront commandés, des expérimentations seront engagées sur de nouvelles technologies propres comme l’hydrogène, la recharge électrique à l’arrêt sans caténaires ou par induction ;
- Nous viserons un nouveau doublement de l’usage du vélo en dix ans. Le kilométrage des pistes cyclables sera lui aussi doublé, avec de grands itinéraires continus ;
- Nous avons l’objectif de 50 % des livraisons du dernier kilomètre en mode non diesel en 2017, pour atteindre le zéro diesel en 2020. Cela passera par des projets de plateformes « fleuve et fer », à l’image des réalisations réussies dans ce domaine au cours de la mandature précédente (suppression de 10 000 à 12 000 camions par an grâce au transport ferroviaire, contribuant à diminuer de 50% les émissions de polluants et 47% celles de CO2 ; 3 874 camions par an en moins dans nos rues, soit une diminution de 234 tonnes de CO2, grâce au transport fluvial). »
3) En termes d’innovations énergétiques, qu’est-ce qui vous différencie de votre principale concurrente, NKM ? 4) Et sur le plan de la réduction de la précarité énergétique ?
« Nous vous invitons à vous référer à l’analyse indépendante du « réseau action climat » qui a noté les projets des différents candidats à la Mairie de Paris.
La meilleure note (A) est attribuée au programme d’Anne Hidalgo. »
5) En 2015, Paris sera le centre du monde énergétique, avec la tenue de la Conférence Climat. La ville de Paris sera alors plus que jamais exposée. Qu’attendez-vous de ce grand rendez-vous ?
« Nous attendons avant tout de la conférence mondiale sur le changement climatique, organisée sous l’égide des Nations Unies à Paris en 2015, des avancés concrètes en termes d’accord internationaux. L’objet de cet événement est de conclure un accord international sur le climat, applicable après 2020 à tous les pays. C’est notre attente première.
Nous profiterons de cet événement pour renforcer le rôle de notre ville comme acteur crucial des négociations et de la mise en œuvre de la transition écologique. La paléoclimatologue Valérie Masson-Delmotte écrivait récemment « plutôt que d’attendre un accord qui vienne uniquement des États, on peut aussi réfléchir à d’autres échelles. Celle des grandes métropoles, vulnérables, qui peuvent travailler ensemble et faire des propositions concrètes pour Paris 2015. Celle des territoires aussi, avec des élus qui peuvent agir localement et obtenir des bénéfices à court terme. Il y a aussi, à ce niveau-là, une prise de conscience des enjeux du changement climatique. »
Le moment aussi sera bienvenu pour faire de Paris une vitrine de l’économie circulaire, où nous chercherons à sensibiliser non seulement les Parisiens mais aussi le monde entier. »
A. Hidalgo place au centre de son programme la nature en ville, l’économie circulaire et la transition énergétique « pour relever les défis majeurs du 21e siècle ». Pour ce faire, sous sa mandature, elle compte consacrer 1 milliard d’euros sur des mesures et des solutions concrètes telles que la végétalisation des toits, le développement de l’agriculture urbaine, la construction de nouveaux éco-quartiers, l’expérimentation de systèmes de récupération des énergies dissipées ou encore la modernisation des systèmes de gestion de la circulation…Coté pollution, A. Hidalgo souhaite faire de Paris une référence en continuant à diversifier les types de transport en commun, en favorisant la mobilité électrique ou encore en supprimant le diesel sur le dernier kilomètre de livraison d’ici 2020.
La ville intelligente et durable est clairement devenu un thème de plus en plus politisable et politisé. Depuis le Grenelle de l’environnement il y a quelques années, les Plans Climat Énergie et autres Agendas 21 n’ont cessé de se développer, faisant la part belle à de nombreuses initiatives Smart : mise en place d’expérimentations de ville intelligente, multiplication des constructions d’éco-cité / d’éco-quartier, création de labels pour mettre en avant les villes les plus durables… Grâce à Energystream, vous vous êtes peut-être forgé un avis sur la pertinence de ces thèmes dans les « Paris Énergétiques » d’Anne Hidalgo et de NKM ? Place désormais aux votes et aux résultats des urnes !
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