Effacement de consommation : un décret vient encadrer le dispositif

L’effacement des consommations électriques en France est en plein essor. Les opérateurs comme Direct Energie (premier opérateur qualifié par RTE pour réaliser des effacements diffus) ou Smart Grid Energy (présent dans l’effacement industriel) connaissent une forte croissance.
C’est dans ce contexte que le décret n° 2014-764 du 3 juillet 2014 relatif aux effacements de consommation d’électricité a été publié le 5 juillet 2014 au Journal Officiel. Il vient encadrer le dispositif en définissant les notions clés (effacement et opérateur d’effacement), en fixant le rôle de chacun des acteurs ainsi que la méthodologie de valorisation. Revenons en détails sur ces éléments.

Définition des notions clés

Ainsi, l’effacement est défini comme « une réduction temporaire et non récurrente de la consommation, effectuée sur sollicitation ponctuelle d’un opérateur d’effacement. Cette sollicitation peut prendre diverses formes telles qu’un boîtier installé chez le consommateur, un signal électronique ou téléphonique… L’effacement correspond au « niveau de soutirage effectif d’électricité sur les réseaux publics de transport ou de distribution d’électricité, par rapport à un programme prévisionnel de consommation ou à une consommation estimée ». Le texte précise en outre que la réalisation d’effacements de consommation ne peut se faire sans l’accord préalable du consommateur final.

L’opérateur d’effacement est quant à lui caractérisé comme une personne morale qui valorise les effacements de consommation. Il est possible de les valoriser par deux moyens : sur les marchés de l’électricité ou via le mécanisme d’ajustement. Pour ce dernier, le gestionnaire de réseau d’électricité RTE vérifiera que l’opérateur détient les capacités techniques nécessaires pour mettre en œuvre ces effacements. Pour dire les choses simplement, l’opérateur d’effacement sollicite (par exemple via l’envoi d’un signal) les clients volontaires afin qu’ils réduisent durant une courte durée leur niveau de consommation d’électricité. Il est en suite en charge de valoriser ces effacements afin que le procédé soit économiquement intéressant.

La liste des opérateurs est publiée par le gestionnaire du réseau d’électricité sur son site internet.

Rôle central du Réseau de transport d’électricité (RTE)

Le décret place le gestionnaire de réseau d’électricité, RTE, au centre du dispositif.

En effet, RTE est chargé, après consultation des parties prenantes, de définir les règles relatives à la mise en œuvre d’effacements de consommation sur les marchés de l’énergie et sur le mécanisme d’ajustement. Ces règles devront ensuite être validées par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) afin d’être publiées au Journal Officiel.

RTE est aussi en charge de la certification qui garantit le caractère effectif de l’effacement de consommation réalisé. Les données utilisées pour cette certification seront issues des dispositifs de comptage des gestionnaires des réseaux publics de transport et de distribution d’électricité via les compteurs intelligents notamment. Si elles ne sont pas suffisantes, les données de l’opérateur d’effacement pourront être utilisées.

À noter que RTE pourra déléguer certaines de ses missions à des tiers indépendants, à l’exception de la certification des volumes d’effacement.

Les opérateurs d’effacement devront quant à eux déclarer préalablement à RTE les effacements qu’ils ont l’intention de réaliser. Les modalités du contrôle de la régularité des effacements par rapport aux effacements annoncés restent à définir.

Modèle économique de l’effacement

Le décret, malgré l’absence de données chiffrées, met en place le modèle économique de l’effacement.

Ainsi, il indique que le fournisseur (EDF, Direct Energie, Planète OUI…) du site effacé bénéficiera d’un versement effectué par l’opérateur d’effacement (ou dans certains cas par le consommateur final). Le montant de ce versement sera fixé par le gestionnaire du réseau transport d’électricité (RTE) et devra refléter la part énergie du prix de fourniture (le prix fourniture représente environ 36% du prix final payé par un particulier selon la CRE). Des barèmes forfaitaires établis en fonction des caractéristiques des sites dont la consommation a été effacée seront implémentés. En ce qui concerne les contrats, ils pourront directement être conclus entre l’opérateur d’effacement, le fournisseur et, le cas échéant, le consommateur final du site. RTE devra alors en être informé.

En outre, un compte spécifique retraçant et centralisant les flux financiers entre les opérateurs d’effacement et les fournisseurs d’électricité sera ouvert. RTE, ou un tiers qu’il mandatera, assurera la gestion administrative, comptable et financière de celui-ci.

Les opérateurs d’effacement seront rémunérés par une prime qui prend en compte les multiples avantages de l’effacement pour la collectivité : contribution à la maîtrise de la demande, à la réduction des gaz à effet de serre et des pertes sur les réseaux. La prime d’effacement sera fonction du volume d’effacement certifié. Elle pourra varier en fonction de catégories d’effacements qui seront fondées sur les caractéristiques techniques (puissance souscrite sur le site effacé, procédé par lequel est obtenu l’effacement, volumes d’effacement cumulé réalisés) et sur les caractéristiques économiques (investissements réalisés par l’opérateur pour procéder aux effacements, coûts opérationnels) des effacements concernés. Ces catégories ainsi que les montants de la prime associée seront fixés par arrêté ministériel pris après avis de la CRE et feront l’objet d’un réexamen annuel. En outre, le décret précise que la prime ne peut conduire à une rémunération excessive comparée à une rémunération normale des capitaux.

Dans la pratique, le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité (RTE) établira et transmettra trimestriellement à chaque opérateur les volumes d’effacements réalisés après avoir été certifiés. Ils seront distingués selon les catégories d’effacements évoquées précédemment. Ces données seront ensuite transmises à la CRE sous la forme d’un récapitulatif. Cette dernière évaluera, à partir de ce récapitulatif et du montant de la prime fixé par l’arrêté, la somme trimestriellement versée aux opérateurs d’effacement pour les effacements réalisés et certifiés au cours de la période considérée. Enfin, elle indiquera ce montant à la Caisse des dépôts et consignations, qui le versera à l’opérateur d’effacement.

Ce décret, notamment via la mise en place de la prime, représente un coup de pouce au développement de l’effacement de consommation électrique. Toutefois, les règles et modalités restant à fixer par RTE seront primordiales pour en évaluer l’ampleur.

7 thoughts on “Effacement de consommation : un décret vient encadrer le dispositif

  1. Votre article est très intéressant.

    Directe énergie est le premier opérateur d’effacement diffus certifié par RTE. Voltalis est le premier opérateur d’effacement diffus qualifié par RTE. Quelle est la différence?

    Le décret dit aussi que: « Ne sont pas pris en compte les effacements indissociables de l’offre de fourniture. » Quel impact pour les fournisseurs, serait-ce une barrière à l’entrée?

    ps: le lien « selon la CRE » ne fonctionne pas.

    Merci pour votre réponse et pour votre article.

    Mickael B.

  2. Bonjour Mickaël,

    Les deux acteurs se targuent d’être le premier acteur d’effacement diffus qualifié mais sur deux mécanismes de marché différents.

    – Direct Energie est en effet le premier opérateur d’effacement qualifié par RTE pour « pour valoriser des effacements diffus sur le marché de l’électricité ». Cela s’inscrit donc dans le cadre du mécanisme NEBEF.

    Pour en savoir + :
    https://clients.rte-france.com/lang/fr/clients_producteurs/services_clients/dispositif_nebef_agrement_qualification.jsp

    – Voltalis était le premier opérateur d’effacement diffus qualifié comme acteur d’ajustement (depuis 2008). A noter que Voltalis est aussi qualifié pour valoriser ses effacements sur le marché de l’énergie (cf : https://clients.rte-france.com/lang/fr/visiteurs/vie/nebef_operateurs.jsp).

    Concernant la deuxième partie de ton commentaire, il est difficile de mesurer l’impact pour les fournisseurs pour le moment. Toutefois, on peut imaginer que les fournisseurs utilisent des filiales. Cela pourrait par exemple être le cas de GDF Suez avec Ecometering.

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