Masdar, Masdar, Masdar… Ah oui, un projet des EAU entrepris il y a maintenant 10 ans ! Du rêve au mirage, il n’y a qu’un pas, ou alors 10 ans. Aventurons-nous ensemble dans ce beau projet, en plein cœur du désert, à quelques centaines de mètres de l’aéroport international d’Abu Dhabi (NDLR : Google Maps n’ayant malheureusement pas encore d’itinéraire en transports en commun ou à vélo pour s’y rendre, c’est donc en voiture Simone que nous découvrirons cette future ville 100% écologique. Cruelle fatalité :))
Rappel de la genèse de Masdar, ses fondations
Imaginé en 2006, ce projet de cité « zéro-émission carbone » était extrêmement louable : sur une surface de 6km² environ, le cheick … nous offrait des perspectives particulièrement ambitieuses : d’ici à 2016, elle devait accueillir 1500 entreprises/start-ups, 50 000 habitants plus 40 000 pendulaires, n’avoir aucun
Pour atteindre une ville aussi verte, les ingénieurs et architectes ont pioché parmi des innovations en vogue, tout en les complétant par des créations propres aux besoins de Masdar :
Des modes de transports propres, via un système de Personal Rapid Transit. Il s’agit de capsules 6 places, alimentées par des batteries lithium-phosphate, qui se déplacent à une vitesse de 40km/h et circulent de façon autonome sur des « itinéraires aimantés » enfouis dans le sol. En libre-service, elles permettent aux habitants d’aller d’un point A à un point B via le meilleur trajet calculé par le véhicule, et ce sans arrêt intermédiaire.
Une tour à vent dans laquelle se cache un système de brumisation, permettant d’aspirer à son sommet les vents chauds, et de les transformer en air frais pour les piétons du centre-ville. Ce dispositif vient en complément d’une architecture favorisant au maximum les zones d’ombre. En effet, dans une région où la température ambiante peut atteindre les 50°C, toutes les précautions sont nécessaires pour permettre la libre-circulation des habitants dans des conditions acceptables.
Des systèmes de production solaire, principaux invités d’une région où la grosse étoile frappe fort quotidiennement. L’objectif initial était de surplomber l’ensemble des bâtisses par des panneaux photovoltaïques, afin de répondre aux besoins énergétiques de celles-ci, tout en apportant des zones d’ombre complémentaires aux ruelles avoisinantes.
La liste est extrêmement longue, car Masdar est avant tout une ville-laboratoire, où non seulement les avancées technologiques et smart sont ambitieuses, mais où le Masdar Institute of Science and Technology veille à un renouvellement permanent des inspirations novatrices.
Le progrès ayant un coût, l’addition initiale salée est annoncée à 22 milliards de dollars.
Masdar : tour du propriétaire en 2016
Au même titre que Rome ne s’est pas construite en 3 jours, mettre sur pied une ville du futur sur un terrain désertique ne se sera pas fait en 10 ans. C’est un premier constat assez facile à faire, qui ne saurait véhiculer un quelconque sarcasme tant l’entreprise était ambitieuse. Néanmoins, disons que le triangle qualité/coûts/délais en prend un certain coup :
Prenons d’abord le sommet qualité, et constatons que les dirigeants du projet ont abandonné leur objectif initial, celui de construire la première ville mondiale n’émettant pas de carbone. Le système de PRT initialement prévu sera complété (remplacé ?) par des bus électriques ou des voiturettes solaires, et un tramway devrait également être construit. Les capsules 6 places ne permettent à ce jour que la liaison entre l’entrée de Masdar et son centre-ville, essentiellement à des fins touristiques.
D’un point de vue budgétaire, c’est une baisse de plus de 3 milliards de dollars. Et malheureusement, il ne s’agit pas d’économies réalisées sur le projet, mais plutôt d’un scepticisme des investisseurs couplé à la crise financière de 2008.
Enfin, vous n’êtes pas sans savoir que Masdar devait être « livrée » cette année. La réalité en a voulu autrement, et ce sont 14 années de retard qui sont prévues au planning. Cela explique peut-être les données démographiques assez douloureuses : loin des 50 000 habitants et 40 000 pendulaires attendus, ce sont quelques 300 résidents (principalement des étudiants) et 2000 chercheurs ou salariés qui séjournent quotidiennement à Masdar, un total que pourrait accueillir le Grand Rex pour une projection de Minority Report…
Et après ?
Ce premier trimestre 2016 est marqué par un « changement de propriétaire » : au mois de février, le président de Masdar, Dr Sultan Al Jaber, nomme Mohammad Jameel Al Ramahi nouveau P-DG de Masdar. Un renouvellement qui intervient à l’issue de la durée initiale du projet (2006-2016), pour donner un nouvel élan dans la construction de cette ville-champignon, dont la nouvelle échéance est fixée à 2030.
Malgré l’important retard pris dans les travaux, sachons déjà, à l’aube de la COP 21, reconnaître et retenir l’initiative de cette ville verte, voulue par le 3ème Etat à l’empreinte carbone la plus importante.