110… 85… 60 dollars, depuis le mois de juin 2014 le cours du brut ne cesse de reculer sur les marchés internationaux. Pour la première fois depuis avril 2009, les prix du brut américain sont tombés sous la barre des 50 dollars le baril. Jusqu’où les prix du pétrole baisseront-il ?
Pourquoi les prix du pétrole chutent-ils ?
La volatilité des prix est pour certains le signal du ralentissement de la croissance en Chine, en Europe et au Japon. La modération de la demande joue sans aucun doute un rôle important mais c’est surtout du côté de l’offre qu’il faut chercher la cause principale du reflux des cours.
En effet, l’équilibre fragile de l’offre de pétrole a changé sous l’effet de la croissance très rapide de la production du pétrole de schiste aux États-Unis ainsi que d’un changement dans la fonction de réaction de l’Arabie Saoudite (1er exportateur et 2ème producteur mondial de pétrole). En effet, l’Arabie Saoudite a réalisé qu’elle n’était plus en position de soutenir seule les cours du brut, au risque de perdre rapidement des parts de marché et, par conséquent, a choisi d’imposer sa politique de bas prix, préférant rogner sur les marges.
De plus, en novembre 2014, quand l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) a annoncé, Saoudiens en tête, qu’elle ne réduirait pas sa production, les investisseurs ont paniqué et déclenché une nouvelle baisse des prix du pétrole.
Pour plus de détails à ce sujet je vous invite à lire l’article suivant : Vers un nouvel ordre pétrolier.
Jusqu’où cette baisse des prix peut-elle aller ?
Personne ne peut réellement savoir de quoi demain sera fait. Toutefois, certaines prévisions ont été réalisées pour 2015.
L’Agence Internationale de l’Energie (AIE) prévoit que la demande mondiale de pétrole restera en berne en 2015. En effet, la chute actuelle des prix du pétrole n’est pas suffisante pour relancer la consommation d’or noir dans un contexte économique peu dynamique. En outre, la réunion de l’OPEP en novembre 2014 n’a pas permis d’endiguer la baisse du cours du pétrole et, si rien ne change par ailleurs, le marché restera sur-capacitaire de 1,3 million de barils par jour en 2015.
En octobre dernier, soit avant la réunion de l’OPEP, les statistiques officielles américaines tablaient sur un baril à 85 dollars en 2015. Des prévisions qui ont été rapidement dépassées par le marché puisque ces mêmes statistiques prévoient aujourd’hui un baril à 68 dollars en moyenne pour 2015. Certains traders parlent même d’un baril à 30 dollars, voire à 20 dollars, un niveau jamais vu depuis 2002.
Toutefois un événement pourrait bien remettre en cause ces prévisions. En effet, vendredi dernier, après l’annonce du décès du roi Abdallah d’Arabie Saoudite, le prix du baril de pétrole a augmenté de plus de 3% à New York. Cette tendance sera-t-elle durable ? Rien n’est moins sûr. Malgré ce sursaut, les cours du pétrole restaient en repli la semaine dernière.
Une annonce clé dans les semaines à venir pourrait permettre de lever les incertitudes quant à la politique pétrolière du royaume d’Arabie Saoudite : l’actuel ministre du pétrole, Ali al-Naimi, artisan de la stratégie pétrolière du pays depuis 1995, sera-t-il confirmé dans ses fonctions ? « Naimi est respecté et aucun changement ne devrait intervenir tant que l’actuel cabinet restera en place », affirmait Florence Eid-Oakden, économiste en chef d’Arabia Monitor à Londres.
Quelles en sont les conséquences sur l’économie mondiale ?
Les conséquences de cette nouvelle donne sur l’économie mondiale sont multiples : il y a des gagnants et des perdants.
Les consommateurs gagnent en pouvoir d’achat? (par exemple les automobilistes, via le prix des carburants). En raison de la baisse de l’euro par rapport au dollar, l’Europe en bénéficie moins que les États-Unis. Mais elle profite par ailleurs du recul du prix du gaz naturel, souvent lié à celui du pétrole. En revanche, les pays gros exportateurs de pétrole, comme la Russie ou l’Algérie, sont les grands perdants de la nouvelle donne. En effet, nous observons un transfert de revenus massif des pays exportateurs vers les pays importateurs.
Enfin, les effets de cette baisse sont très variables au niveau sectoriel, en fonction de l’intensité énergétique des secteurs d’activité. Par exemple, l’industrie chimique devrait être l’une des premières bénéficiaires.
Alors que certains experts parient sur un futur baril de pétrole à 20 dollars, les économistes restent toutefois divisés sur l’impact global de cette chute des prix qui pourrait faire augmenter la croissance mondiale autour de 0,5 point en 2015 mais qui alimente également les incertitudes sur la solidité de la reprise économique et risque de freiner les projets de transition énergétique des États.