Au Maroc, depuis l’indépendance, la croissance industrielle et l’explosion démographique ont considérablement augmenté les émissions de gaz à effet de serre et la pression sur les ressources naturelles… Pour le royaume, produire une énergie compétitive, respectueuse de l’environnement de manière fiable et flexible devient nécessaire pour faire face aux défis économiques, sociaux et environnementaux toujours croissants.
Maroc : une nouvelle marche verte ?
Il y a encore quelques années, le Maroc était totalement dépendant des combustibles fossiles représentant 68% du mix énergétique en 2008. Mais dès novembre 2009, le royaume s’est engagé dans une ambitieuse politique de développement des énergies renouvelables.
Maroc : sea, sun and wind
En investissant l’équivalent de 123.5 milliards MAD (soit 11.4 milliard d’€) dans le solaire et l’éolienne d’ici 2020 le royaume chérifien lance le plan national de développement des énergies renouvelables pour enfin profiter de son énorme potentiel en énergies renouvelables.
L’objectif premier est d’atteindre 42 % d’ENR dans la capacité électrique totale installée à horizon 2020. C’est-à-dire, réussir à augmenter la part des énergies renouvelables dans la puissance installée de 9.8 points en 10 ans. Ce plan se subdivise en 2 principaux programmes : le Programme Energie Solaire et le Programme Energie Eolienne.
Le Programme Energie Solaire : une priorité nationale
Le Programme Energie Solaire marocain cible une capacité de plus de 2000MW soit 14% de la capacité installée d’ici 2020. Ceci équivaut à la consommation globale d’une grande ville marocaine comme Casablanca. Il se répartit sur 5 sites identifiés Ain Benthar, Ouarzzate, Sebbkhate Tah , Foum Al Ouad, Boujoudour.
La principale réalisation du Programme Energie Solaire est le projet NOOR (en arabe lumière). Dans Ce cadre Ouarzazate a vu naitre la première tranche de la toute première centrale solaire thermodynamique marocaine (500 MW attendu) pour un coût global 80 milliard de MAD (soit 7 432 K€).
Mené par le saoudien Acwa Power International, ce premier complexe d’une capacité électrique de 160 MW, a injecté en ce mois d’août 2015 son premier KWH produit. Les autres phases du projet seront menées par un consortium du saoudien et de l’espagnol SENER.
Toutefois, les financements sont d’une envergure internationale avec la participation de différents acteurs à des montages financiers complexes. Parmi les parties prenantes se trouvent : la KFW BANKENGRUPPE, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, l’agence France de développement, le fonds pour les technologies propres, la banque européenne d’investissement l’union européenne (par la facilité d’investissement pour le voisinage).
NOOR- composé de 5 complexes solaires – avance selon les calendriers annoncés. Le prochain site est Noor Midelt. Sa capacité totale prévue est de 500MW. Sa construction débutera à la fin de l’année 2015.
L’Énergie éolienne : le vent en poupe
Le potentiel estimé du Maroc pour l’énergie éolienne est de 25 000 MW. Ne sont actuellement exploitées (ou en cours de développement) que 1000MW. Le dernier site entré en service en décembre dernier est celui de Tarfaya mené conjointement par Engie et Narva holding avec une capacité de 300MW.
Le programme d’énergie éolienne, deuxième pilier du plan stratégique d’énergies renouvelables, ambitionne d’atteindre une capacité de 2000 MW à l’horizon 2020.
Les investissements nécessaires sont évalués à 34.1 milliards de MAD (soit 3, 14 Milliards d’€) et doivent permettre de faire une économie de 1.5 millions de tonnes en équivalent pétrole (tep)/an et de réduire les émissions en CO2 de 5.6 millions de tonnes.
Pour atteindre ces objectifs, il est prévu 5 nouveaux parcs éoliens avec une bonne couverture du territoire :
- La seconde tranche de Tanger (150MW)
- Parc Koudia Al Baida près de Tétouan (300 MW)
- Parc de Taza (150 MW)
- Parc de Tiskrad près de laâyoune (300MW)
- Parc de Boujdour (100MW)
Tout comme pour le programme énergie solaire, de nombreuses multinationales financent et travaillent à la mise en œuvre de ces projets de grandes envergures.
Par exemple, Alstom a contribué à la construction du premier parc éolien du sud à Akhfennir (opérationnel depuis 2013, ce site totalise 100MW grâce à 61 éoliennes). Alstom est également engagé dans la préparation du parc de Taza confié à EDF énergies nouvelles et propose les technologies Alstom Wind aux différents clients intéressés par l’éolien au Maroc.
Ces projets éoliens commencent à porter leurs fruits : en 2014, la consommation d’électricité éolienne a progressé de 41% par rapport à 2013. Ainsi les projets liés aux énergies renouvelables modifient le mix énergétique marocain pour atteindre celui prévisionnel en 2020.
Energies vertes : un nécessaire renouvellement réglementaire et institutionnel :
La mise en œuvre de cette vision stratégique quasi-avant-gardiste dans la région, a été accompagnée par l’adaptation de l’arsenal réglementaire et institutionnel avec notamment :
- La promulgation en février 2010 d’une loi 13-09 relative aux énergies renouvelables. Ses textes ont doté le secteur d’une gouvernance ad hoc, ont réorganisé le secteur électrique et ont mis en place un schéma national de régulation
- La créationd’organismes d’accompagnement :
- La Moroccan Agency for Solar Energy (MASEN), une société à capitaux publics créée en mars 2010 et qui réunit à parts égales l’Etat marocain, le Fonds Hassan II pour le développement économique et social, l’Office National de l’Electricité et la Société d’Investissements Energétiques (SIE). MASEN est dédiée au pilotage du programme intégré d’Energie Solaire.
- La SIE, dotée de 1 Md de MAD (100 millions d’€) provenant du Fonds de Développement Energétique (FDE), elle doit accompagner le plan national de développement des énergies renouvelables en investissant dans divers projets (capacités de production énergétique, valorisation des ressources énergétiques renouvelables, renforcement de l’efficacité énergétique)
Bénéficiant d’une impulsion royale certaine, les nombreux projets stratégiques du plan national de développement des énergies renouvelables avancent à bonne cadence. Mais quelles sont les réelles opportunités que souhaite saisir le Maroc à travers ces plans ambitieux ? Qu’est –ce qui pourrait menacer ce dynamisme ? Quelles sont les faiblesses des projets engagés ? Quels autres défis faudra-t-il relever pour être un géant vert dans la région ? C’est ce que nous éclairerons dans notre prochain volet.