RTE vient de rendre public son schéma décennal de développement du réseau de transport, conformément aux missions qui lui sont conférées par le législateur. En plein débat sur la transition énergétique, ce document prospectif, qui identifie les principaux besoins de développement du réseau à très haute tension (THT) en France pour les dix ans à venir, revêt une importance particulière. La réalisation de certains projets d’investissement dépendra, de fait, de l’évolution du mix énergétique retenue à cette occasion. Synthèse.
La transition énergétique au cœur du schéma
Si, hier, le réseau de transport a pu être associé à un système de production centralisée, ce n’est plus réellement le cas aujourd’hui. Et cela le sera, de toute évidence, encore moins demain.
L’essor des énergies renouvelables, en particulier solaire et éolienne par nature intermittentes et décentralisées, requiert renforcement et développement de ce réseau. Le débat sur la transition énergétique vers une économie moins dépendante des énergies fissile et fossile – qui débouchera sur une loi de programmation en 2013 – doit apporter des réponses à des questions fondamentales pour anticiper l’adaptation des infrastructures. De fait, si l’objectif de ramener la part du nucléaire dans le bouquet électrique français à 50% à l’horizon 2025 semble acté, les moyens pour y parvenir ne le sont pas : Quel « mix renouvelable » ? Quelle localisation de ce nouveau mix sur le territoire national ?
C’est seulement au regard de la composition et de la localisation du nouveau mix que pourra se préparer le système électrique de demain.
Les projets d’investissement à 3 ans
Quelle que soit la composition et la localisation du nouveau mix énergétique français, un socle d’investissements invariants reste cependant à prévoir.
Les grands chantiers que RTE prévoit de mener à court terme visent à lever des contraintes qui pèsent sur le réseau de transport d’électricité. La filiale d’EDF entend consacrer environ 1,5 milliard d’euros par an sur cette période pour le développement du réseau, mais aussi pour le renouvellement et l‘amélioration de la résistance des ouvrages en vue de renforcer la sécurité d’alimentation et la qualité de fourniture.
Au total, le schéma recense 170 projets majeurs à l’horizon 3 ans sur l’ensemble du territoire français, dont 63 portent sur la création de lignes souterraines. Parmi les projets phares, il convient de citer la nouvelle interconnexion franco-espagnole qui permettra de porter l’échange avec le pays ibère de 1400 MW à 2800 MW à l’horizon 2014, accélérant ainsi le désenclavement de la péninsule.
La stratégie d’investissement à 10 ans
2022 sera une année charnière pour la transition énergétique. À cette date, l’arrêt programmé des dernières centrales nucléaires allemandes et des premières centrales suisses devrait accélérer la transformation du mix électrique européen. Les projets que RTE prévoit de mener à moyen terme visent à fluidifier le réseau de transport d’électricité :
1) Augmentation des capacités d’échange dans certaines zones frontalières afin de satisfaire les besoins de transit
Il s’agit, entre autres, de renforcer l’interconnexion avec les îles britanniques, péninsule électrique aujourd’hui enclavée. Une nouvelle interconnexion entre la Normandie et l’Angleterre d’une puissance de 1 000 MW pourrait ainsi être mise en service avant 2020.
2) Sécurisation de l’alimentation des territoires locaux dont la croissance de la consommation électrique induirait des risques de coupure si le réseau n’était pas adapté
La restructuration du réseau alsacien, en tenant compte de l’arrêt planifié du CNPE de Fessenheim, apparaît comme une priorité. Des dispositions palliatives devront être mises en œuvre pour anticiper la fermeture de la centrale : installation de batteries de condensateurs dans les postes électriques alsaciens pour maintenir la tension électrique, doublement de l’alimentation du poste de Scheer afin d’améliorer la sécurité de l’approvisionnement électrique de la ville de Strasbourg, agrandissement des dispositifs d’aiguillage pour améliorer le pilotage des flux d’électricité dans la zone…
3) Adaptation en vue d’accueillir les nouveaux moyens de production
Afin d’accompagner le développement des énergies renouvelables, en particulier de l’éolien terrestre et offshore, d’importants renforcements et adaptations du réseau de transport seront nécessaires. Par exemple, la zone comprise entre le Cotentin et la Bretagne constitue le deuxième plus grand gisement de production hydrolienne d’Europe, de l’ordre de 10 GW. Un réseau sous-marin sera incontournable à moyen terme pour permettre l’approvisionnement en énergies renouvelables et la solidarité du système électrique européen.
35 À 50 Milliards d’euros d’investissement selon le mix énergétique à l’horizon 2030
Le schéma décennal envisage quatre scénarios d’évolution de la consommation électrique et du mix énergétique : un scénario Consommation forte, un scénario Croissance faible, un scénario Nouveau mix et un scénario Médian.
Selon le « bouquet électrique » retenu au terme du débat sur la transition énergétique, le montant des investissements à réaliser à l’horizon 2030 pourra varier. À titre d’exemple, le coût cumulé du scénario Médian établi par RTE avoisinerait 35 à 40 milliards . Celui du scénario Nouveau mix atteindrait 50 milliards dont environ 5 milliards supplémentaires pour les interconnexions et 5 à 10 milliards pour le déclassement du nucléaire et le développement des énergies renouvelables.
Nous l’aurons compris, le défi pour RTE est d’adapter son réseau au rythme de l’évolution du paysage énergétique. À travers ce schéma décennal, la filiale d’EDF réaffirme sa position : pour être au rendez-vous du changement de paradigme énergétique qui se dessine en Europe et plus particulièrement en France, il est essentiel de renforcer et développer les infrastructures de transport.
« Sans développement du réseau, les progrès en matière d’énergie renouvelable tournent à vide ». Tout est dit. Et beaucoup reste à faire au cours de ces dix prochaines années…
Donc clairement les développement des EnR ainsi que la fermeture de Fessenheim induisent des frais considérables sur le réseau, et une augmentation des pertes électriques pour Fessenheim, une information qui n’est jusqu’à présent absolument pas inclue dans le débat public.
C’est bien de le savoir, merci.