Le groupe allemand E.ON, producteur et fournisseur d’électricité, de gaz naturel et de services énergétiques, vient de provoquer une véritable révolution dans le marché européen de l’énergie. Le 30 novembre, il a en effet annoncé un repositionnement radical de ses activités en direction des énergies renouvelables. Cette décision a été prise suite à une large étude du secteur, menée depuis janvier 2014.
Un groupe fragilisé par les difficultés persistantes du secteur
Cette annonce fait suite au ralentissement du secteur énergétique européen par lequel E.ON est particulièrement affecté. Du fait de la crise, les producteurs d’énergies conventionnelles sont fragilisés par la concurrence des énergies renouvelables, mais également par les surcapacités.
Le développement des énergies « vertes », subventionnées et prioritaires sur le réseau, a en effet été massivement soutenu par certains pays. Ainsi, en Allemagne, la décision de sortir du nucléaire d’ici 2022 a fait monter leur part à 25 % de la production électrique totale du pays. En outre, les énergéticiens comme E.ON sont contraints de tirer un trait sur leurs centrales nucléaires.
Ces nouvelles capacités de production « vertes » se sont ajoutées aux surcapacités déjà existantes : la demande d’énergie primaire en Europe a en effet baissé de 1,4 % par an depuis 2006. Une contraction de la demande qui s’explique par les efforts d’économies d’énergies, mais également par la crise économique. Ce déséquilibre entre l’offre et la demande a contribué à la forte chute des prix de gros de l’électricité. Ces derniers ont été divisés par deux en cinq ans.
E.ON se trouve ainsi aujourd’hui à la charnière entre deux modèles : le modèle traditionnel avec des prix par nature fluctuants comme ceux du charbon ou du pétrole ; et le nouveau modèle qui permet de vendre l’électricité à prix fixe par le biais des énergies renouvelables.
Deux sociétés pour deux offres d’énergie ?
Pour mettre en cohérence l’entreprise avec cette conviction, les dirigeants d’E.ON ont décidé la scission de toutes leurs activités de production électrique conventionnelle. Les centrales nucléaires, au charbon ou au gaz, qui représentent 50 gigawatts de capacité en Europe et en Russie, seront gérées par une société à part, dont l’entrée en bourse sera préparée dès 2015 pour une cession effective en 2016.
Le groupe E.ON va, de son côté, se concentrer sur un nouveau cœur d’activité : les énergies renouvelables, la gestion des réseaux et les services aux clients. Les trois quarts du résultat de l’entreprise seront ainsi générés grâce à des activités régulées, bénéficiant pour le moment de prix fixes avantageux. Le groupe va également miser sur des marchés porteurs, dont la Turquie, la Russie et le Brésil, et prévoit dès l’an prochain d’investir près de 5 milliards d’euros en Europe et en Turquie, notamment dans les réseaux intelligents.
Parallèlement, les branches ne correspondant pas à ces deux nouvelles entités vont être cédées : le groupe a d’ores et déjà annoncé la cession de ses actifs en Espagne et au Portugal pour 2.5 milliards d’euros. Il devrait en être de même pour ce qu’il détient en Italie.
En se séparant ainsi de ses actifs les moins performants, E.ON cherche à tirer profit des nouvelles opportunités de croissance offertes par la recomposition du secteur énergétique. Une stratégie qui sera sans nul doute observée de très près par les autres acteurs du secteur…